Paris – De la rue du bac à Notre Dame des Victoires

17 mars 2024, de la médaille miraculeuse à une chasse aux trésors

Avec Julien, Raphaël, Maximilien et Claire.

Un pèlerinage de quelques centaines de mètres (un record de petitesse !) qui s’est fini – sous la houlette d’une épatante religieuse – par une chasse aux trésors pour nos trois enfants dans la basilique ND des Victoires. Moi, j’ai une nouvelle fois entr’aperçu l’intarissable pluie de grâces que le Ciel fait pleuvoir sur la France. Entre quelques ruelles du très vieux Paris, s’entrelacent des siècles d’histoire dense, intense où se croisent lumineusement une paysanne bourguignonne, des missionnaires partant pour l’Asie, une carmélite normande, un Juif converti, l’un des grands rois de France et tant d’autres. Même Mozart et Lulli feront leur apparition sur scène. Mais, en matière d’apparition, rien ne vaut celles de la Vierge Marie. Allons voir !
Une chose est sûre, ce 17 mars 2024, je suis arrivée accablée, je suis repartie apaisée.

La médaille miraculeuse…

Si l’on suivait le parcours de chaque médaille, on ferait je ne sais combien de fois le tour du monde. Si l’on savait tous les bienfaits qu’elle opéra, on en aurait le cœur bouleversé. Cette petite médaille de rien du tout est voyageuse, audacieuse et porte bien son nom de miraculeuse. Le grand Kolbe, saint Maximilien-Marie Kolbe, en distribuait sans cesse et considérait ces médailles comme ses munitions, son arme secrète pour ramener à la Vierge et au Seigneur les cœurs les plus durs. Ratisbonne fut foudroyé à Rome grâce à la médaille miraculeuse.

J’en ai trouvé des palanquées dans les tiroirs de vieilles tables de nuit ici ou là. Pourquoi les ai-je laissées, indifférente ? Des malades et des non-croyants en ont tant besoin…

source internet

Julien et moi en portons une dont l’histoire est particulière. Elle nous fut donnée par un prêtre polonais, alors que nous visitions Niepokalanow. Kolbe, alors, nous donna un joli clin d’œil… Mais c’est un peu secret.

Quelques années plus tard, toujours cette même médaille autour du cou, nous nous trouvâmes invités à déjeuner chez des amis. C’était le 7 juillet 2019. Une journée délicieuse. Les enfants jouaient autour de la piscine. Maximilien, qui avait à peine deux ans, réclama un câlin pour une raison que j’ai oubliée. Je me vois encore le serrer dans mes bras sur la pelouse. Rasséréné, il repartit gambader. Je rejoignis Julien et nos amis pour le café. On décida de rapprocher la table du bord de la piscine pour mieux surveiller les enfants. Soudain, Julien, qui veillait plus que moi, aperçut notre Maximilien tout habillé, la tête sous l’eau. Il le ressortit immédiatement, choqué. Je n’ai strictement rien vu de la scène, mais je me retrouvai avec mon Croquinou tout mouillé dans mes bras. Combien de temps est-il resté dans l’eau ? Nul ne le sait. Maximilien semblait cependant aller très bien. Nous restâmes plus que jamais aux aguets et poursuivâmes l’après-midi très agréable. De retour chez moi, mon amie m’appella :
– Anne-Marie, n’aurais-tu pas perdu quelque chose ? J’ai trouvé ta médaille miraculeuse dans la pelouse. Et moi, bizarrement, j’ai aussi perdu la mienne que je porte en bracelet.

Nous revîmes les événements, Julien et moi, sidérés. Pendant le câlin, pour une raison que je ne comprends pas, ma chaîne s’est ouverte et ma médaille est tombée dans la pelouse. Moins d’une demi-heure après, Maximilien est tombé dans la piscine. Moi, j’étais distraite et n’ai rien vu. Julien, qui avait toujours sa médaille, a pu sauver notre petit garçon de la noyade. Et Dieu sait combien cela arrive vite.

sculpture au-dessus du porche. Filles de la Charité, 140, rue du bac Paris.

Ce dimanche 17 mars 2024, il pleut à Paris. Je poursuis ma série de pèlerinages pour la France, initiés en août dernier. Aujourd’hui : mini pélé pour mini-petons, j’emmène marcher toute la famille, dont notre petite Claire de 3 ans. Nous partirons de la chapelle de la médaille miraculeuse après la messe de 10h00 et nous nous rendrons à la basilique Notre Dame des Victoires dans le 2ème arrondissement, en faisant un court passage aux Missions étrangères. Moins de 40 minutes à pied, à peine 2,5km. Mais qu’on ne s’y méprenne pas : marcher 40 minutes dans Paris avec trois enfants agités est bien plus fatigant que grimper en montagne pendant des heures. Julien sera sherpa de sa princesse et guide. Il connaît Paris par cœur. Nous avons rendez-vous à 14h30 à ND des Victoires avec Sœur Maria pour une visite de la basilique. Nous redoutons le bazar que vont provoquer nos enfants fatigués. C’est sans compter sur les miracles de la Sainte Vierge et les talents des religieuses…

Pour l’heure, à la rue du bac, Julien explique à Raphaël, Maximilien et Claire la grande fresque gravée retraçant la vie de Sainte Catherine-Zoé Labouré. En entrant dans la chapelle pour la messe, un grand black, responsable du service d’ordre, m’invite aimablement à rejoindre ce que les américains appellent la « crying room », un espace de l’église vitré : l’on y entend la messe par la sonorisation, mais les pleurs et hurlements des bébés et des enfants sont laissés aux seuls parents… Excellent concept. Nos trois trésors seront cependant bien sages.

Nous invitons les enfants à venir s’agenouiller devant l’autel, là où la Vierge Marie a daigné venir.

« Venez au pied de cet autel. Là, des grâces seront répandues sur tous. »

Que s’est-il donc passé ici en 1830 ?

Catherine-Zoé Labouré est née en 1806 en Bourgogne dans une famille paysanne. Elle est la huitième enfant. Suivront encore deux autres : Tonine et Auguste qui sera infirme après un accident. Le 9 octobre 1815, la maman, Madeleine Gontard, meurt. Catherine a 9 ans. Monsieur Labouré est contraint de réorganiser la famille et envoie les deux petites, Catherine et Tonine chez leur tante. Orpheline de mère, Catherine se sent aussi orpheline de père dans cette séparation forcée. Mais Catherine a choisi la Vierge Marie comme nouvelle maman. La servante a vu la scène : Catherine a grimpé sur le meuble de la chambre de sa défunte mère pour attraper une statue de Notre-Dame et lui dire : « Maintenant, c’est Toi qui seras ma maman. » 1 Puis Catherine revient à la ferme familiale et Marie-Louise, l’aînée, veut entrer chez les filles de la Charité. Catherine rassure son père : « Avec Tonine, nous ferons marcher la maison ». À 18 ans, elle a un songe : elle rêve qu’elle assiste à une messe célébrée par un vieux prêtre au regard impressionnant, qui lui dit : « C’est bien de soigner les malades. Vous me fuyez maintenant, mais un jour vous serez heureuse de venir à moi. » Elle reconnaîtra plus tard, dans un portrait de saint Vincent de Paul, le prêtre au regard impressionnant. À son tour, elle pense à une vocation, mais son père s’y oppose fermement. Il l’envoie à Paris travailler chez Charles, un des frères de Catherine, qui tient un restaurant. Charles et Hubert, un autre frère, finissent par convaincre monsieur Labouré de la vocation de Catherine. Il cède et Catherine entre enfin en 1830 chez les Filles de la Charité, rue du bac. Les sœurs qui l’acceptent voient en elle « une bonne dévotion, un bon caractère, un fort tempérament, l’amour du travail, et [beaucoup de gaité] ». 2

On le sait moins, mais avant les trois apparitions très connues de Marie, Catherine sera gratifiée de trois apparitions du cœur de saint Vincent de Paul, de nombreuses apparitions de Jésus dans l’eucharistie, d’une vision du Christ-Roi, le 6 juin : « un Christ dépouillé, annonce symbolique de la révolution de Juillet et la chute de Charles X »3 précise Yves Chiron.

source internet

Le 18 juillet 1830, Catherine entend vers 23h30 une voix l’appeler :
– Ma sœur, levez-vous en diligence et venez à la chapelle, la sainte Vierge vous attend.
C’est en apparence un petit enfant de 4-5 ans, son ange gardien.
Catherine arrive à la chapelle. Elle est à genou, à côté de la sainte Vierge qui est assise sur un fauteuil. Il s’ensuit un entretien intime avec la sainte Vierge, dont voici quelques larges extraits4 :

La Vierge continue :

La Vierge demande aussi que la communauté revienne à la règle stricte.

Catherine, relatant des années plus tard cette première apparition, ajoute encore ces propos de Notre Dame :

L’apparition dura 2 heures et demie.

Le 27 novembre 1830, Catherine prie dans la chapelle avec toutes les autres sœurs. Seule Catherine verra l’apparition qu’elle confiera ensuite à son confesseur, le père Aladel, qui rejette toutes ces bagatelles, fruits de l’imagination d’une pauvrette. Catherine obéit. Mais plus tard, ce même Aladel consignera dans ses notes ceci :
« La novice a vu dans l’oraison un tableau représentant la Sainte Vierge telle qu’elle est
ordinairement représentée sous le titre d’Immaculée Conception, en pied et tendant les bras. [Elle était] vêtue d’une robe blanche et d’un manteau de couleur bleu argenté, avec un voile aurore. Il sortait de ses mains, comme par faisceaux, des rayons d’un éclat ravissant. La sœur entendit au même instant une voix qui disait : « Ces rayons sont le symbole des grâces que Marie obtient aux hommes. » Autour du tableau, elle lut, en caractères d’or, l’invocation suivante :
’’O Marie, conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous.’’ […] Quelques moments après, ce tableau se retourne, et sur le revers, elle distingue la lettre M surmontée d’une petite croix et, au bas, les saints Cœurs de Jésus et de Marie. Après que la sœur eût bien considéré tout cela, la voix lui dit :
« Il faut faire frapper une médaille sur ce modèle, et les personnes qui la porteront indulgenciée et qui feront avec piété cette courte prière, jouiront d’une protection toute spéciale de la Mère de
Dieu.»
5

La troisième apparition de décembre 1830 ressemble, sous forme de conclusion et d’adieu, à celle du 27 novembre, avec le même tableau de la médaille et les rayons symbolisant les grâces à demander.

Un détail cependant tourmentera Catherine. Elle veut voir édifier une statue représentant le Vierge portant dans ses mains un globe symbolisant le monde et chacun d’entre nous.


« Oui, ma bonne sœur Dufès, notre douce Reine est apparue, tenant la boule du monde entre ses mains virginales et bénies, la réchauffant de son amour, la tenant sur son cœur miséricordieux, et la regardant avec ineffable tendresse »6 écrit une certaine sœur Grand, appuyant elle-même la demande de Catherine au milieu de tant de tergiversations. Cette statue finira quand-même par arriver, bien que très tard.

Rayonnement

Les fruits de ces apparitions sont colossaux. Les miracles, guérisons et protections opérés par cette petite médaille sont impressionnants et innombrables, comme cette guérison de Caroline Nenain lors de l’horrible épidémie de choléra en 1832.

source internet

Saint Jean-Paul II n’a pas négligé de faire halte en la chapelle de la rue du Bac en 1980. Le 31 mai, il s’adressa aux religieuses en ces termes : « Soyez toujours et partout présentes au monde sans être du monde. Ne craignez jamais de laisser clairement reconnaître votre identité de femmes consacrées au Seigneur. Les chrétiens et ceux qui ne le sont pas on droit de savoir qui vous êtes. Le Christ, notre Maître à tous, a fait de sa vie un dévoilement courageux de son identité. »7

Si Kolbe fut tant marqué par la médaille miraculeuse, c’est que la conversion de Ratisbonne l’a bouleversé. Il semble avoir entendu le récit de cette conversion en 19178. Ordonné à Rome en 1919, il décide de célébrer sa première messe en l’église san Andra delle Fratte9 , précisément là où Ratisbonne s’est converti.

Alphonse Ratisbonne était Juif, de haute famille strasbourgeoise et destiné à une vie des plus brillantes. Un événement le hantait et le remplissait cependant d’une haine constante : son frère Théodore s’était converti au christianisme et était devenu prêtre ! Avant de débuter sa vie professionnelle et avant de se marier, Alphonse Ratisbonne partit en voyage d’agrément. Il voulait gagner l’Orient, mais s’attarda en Italie et passa bien malgré lui à Rome dont rien ne l’attirait. Il y avait cependant un ami, Gustave de Bussières, protestant piétiste. Ratisbonne rencontra le frère de Gustave qui eut l’audace de lui offrir une médaille miraculeuse et lui demanda de réciter le Memorare. Or, pour préparer des funérailles, Théodore de Bussières (le frère de Gustave) invita Ratisbonne à l’accompagner à l’église San Andra delle Fratte. Nous sommes le 20 janvier 1842. La Vierge de la médaille miraculeuse apparut à Ratisbonne. Elle ne lui a rien dit, mais il a tout compris…
Chose rare, cette conversion fut l’objet d’un procès canonique officiel de l’Église catholique.

Les MEP

Nous quittons la chapelle de la rue du bac. Quelques mètres plus loin, nous nous arrêtons aux Missions Étrangères de Paris. Si Kolbe s’est arrêté en 1930 à chapelle de la médaille miraculeuse avant de partir en mission au Japon, d’autres se sont formés aux MEP avant de partir définitivement pour l’Asie.

Nous y récitons la prière de Marcel Van pour la France :
« Seigneur Jésus, aie compassion de la France, daigne l’étreindre dans ton Amour et lui en montrer toute la tendresse. Fais que, remplie d’Amour pour Toi, elle contribue à Te faire aimer de toutes les nations de la terre. Ô Amour de Jésus, nous prenons ici l’engagement de Te rester fidèles et de travailler d’un cœur ardent à répandre ton Règne dans tout l’univers. Amen »

Nous partons maintenant pour la basilique Notre Dame des Victoires dans le 2ème arrondissement. Et puisque tout est lié dans ce mini pèlerinage, je découvre que la lettre dans laquelle Ratisbonne raconte sa conversion est adressée à l’Abbé Desgenettes, fondateur et directeur de l’archiconfrérie de Notre Dame des Victoires10.

La chasse aux trésors parmi les 37220 ex voto organisée par Sœur Maria dans la basilique ND des Victoires et l’histoire étonnante de ce lieu de pèlerinage seront à lire dans le prochain article…

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  1. Sainte Catherine Labouré, sur les chemins de l’Évangile, texte de sœur Marie-Geneviève Roux et sœur Élisabeth Charpy, Éditions Signe, 2000, p. 11 ↩︎
  2. Chiron Yves, Enquête sur les apparitions de la Vierge, Perrin-Mame, 1995, p.175 ↩︎
  3. Chiron Yves, Enquête sur les apparitions de la Vierge, Perrin-Mame, 1995, p.176 ↩︎
  4. René Laurentin, Catherine Labouré, Artège, 2017, pp.38-43
    https://nominis.cef.fr/contenus/messagedeMariecatherinelaboure.pdf ↩︎
  5. René Laurentin, Catherine Labouré, Artège, 2017, pp.45-46
    https://nominis.cef.fr/contenus/messagedeMariecatherinelaboure.pdf ↩︎
  6. René Laurentin, Catherine Labouré, Artège, 2017, pp.121-122 ↩︎
  7. https://www.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/speeches/1980/may/documents/hf_jp-ii_spe_19800531_religiose-francia.html ↩︎
  8. https://www.traditions-monastiques.com/fr/blog/saint-maximilien-kolbe-medaille-miraculeuse-alphonse-ratisbonne-milice-immaculee-n164 ↩︎
  9. https://www.chapellenotredamedelamedaillemiraculeuse.com/apparitions-et-medaille/medaille-miraculeuse/histoire-de-la-medaille/ ↩︎
  10. T. de Bussières, Le converti de la médaille miraculeuse, Ratisbonne, préface d’André Frossard, Éditions Téqui, ↩︎

Publié par Anne-Marie MICHEL

Pigiste catholique, je m'efforce de témoigner de ma foi dans le Christ, chemin, vérité et vie. Ainsi, ce qui est vrai, bien et beau m'élève et ce trésor se partage. Notre temps est encore celui de la miséricorde, eleos en grec, alors proclamons-la à temps et à contre-temps ! Depuis août 2023, le blog relate principalement mes pèlerinages effectués en France pour son relèvement temporel et spirituel.

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