
Notre Dame en feu n’est que la face visible de l’iceberg. La charpente en flamme, surnommée la « forêt », n’est en réalité que l’arbre qui cache la véritable forêt, celle d’une Église en ruine. Comment donc cette Église, que nous affirmons « sainte » dans le Credo, peut-elle être autant défigurée ? Baisse des vocations, désertions des fidèles, demande de « débaptisation », transgressions morales innombrables, désobéissances de prêtres à leur évêque, sans parler des scandales d’abus sexuels… Quel regard l’évêque de Versailles porte-t-il sur l’incendie ? Mgr Bruno Valentin nous livre son analyse dans son livre « Rebâtir ou laisser tomber ? – L’Église au cœur » aux Éditions de l’Emmanuel.
L’auteur ne s’apitoie pas sur la décrépitude de la ruine, il va bien plus loin. Il analyse ce que signifie « appartenir » à l’Église et « participer » à la vie de l’Église. Mais devant les flammes qui la ravagent – et nous ravagent – Mgr Bruno Valentin nous donne des axes de reconstruction. Le plus jeune évêque de France veut rebâtir. Il est temps ! Certes, il y a urgence, mais ce n’est pas nouveau. L’auteur, pour illustrer son propos, s’appuie sur l’événement de l’incendie du 15 avril 2019 et le relie à la vocation de Saint François d’Assise « Va et rebâtis ma maison, qui, tu le vois, tombe en ruine. » En vérité, cela fait deux mille ans qu’il faut la rebâtir !
Le lecteur est amené à méditer une des fresques de la vie de St François peinte par Giotto di Bondone dans la basilique d’Assise.

« Sur la fresque de Giotto, écrit Mgr. Valentin, le porche est totalement détruit. À Notre Dame, heureusement, il a tenu bon, mais il s’en est fallu de peu qu’il ne s’effondre. Dans notre Église elle-même, le seuil est bien la partie la plus endommagée. Là en tout cas se concentrent de graves enjeux de reconstruction. […] C’est d’abord notre capacité à attirer et à accueillir qui est en ruine aujourd’hui. » De seuil, il en est justement question dans l’Évangile, insiste l’auteur. En Lc 16, 19-20, nous lisons la parabole du mauvais riche et du pauvre Lazare. Quelle lecture en faisons-nous en terme de charité et de mission, pour aider à franchir le seuil de l’Église ? « L’annonce de l’Évangile consiste à laver les pieds, et non pas les cerveaux », précise l’auteur.
Poursuivant sa réflexion, Mgr Valentin cite Benoît XVI qui rappelle que l’Église « se développe par «attraction» ». Sommes-nous, fidèles et consacrés, les rois du marketing d’attraction ? Attirons-nous par l’amour que nous dégageons, l’unité que nous construisons, le bien que nous répandons ? Sommes-nous rayonnants de joie, cette joie de l’Évangile, cette joie d’être sauvés ?
Avançant dans son analyse de la fresque de Giotto, nous sommes invités à réfléchir sur notre vie de prière. « L’Église n’est pas seulement le cadre de la prière, elle en est le fruit », nous rappelle l’évêque de Versailles. Nos prières viennent-elles du fond de notre cœur ou suintent-elles mièvrement d’un rabâchage de prières expédiées ou de messes suivies distraitement, parce qu’on est « socialement catho » ? C’est à genoux que nous reconstruirons l’Église.
Mais ce n’est toujours pas suffisant. L’on peut multiplier les œuvres de charité, attirer par nos vertus, rayonner par notre joie, prier, « l’âme de l’Église, c’est la sainteté ».
Alors, ne désespérons pas, devenons des saints, rien de moins ! Mais l’Esprit Saint n’attend que de s’emparer de nous pour cela ! Et l’Église rayonnera !